Propriétaires bailleurs : faire face aux loyers impayés
Non seulement l’argent ne rentre pas mais il faut continuer à régler toutes les dépenses liées au logement, à savoir le remboursement du crédit immobilier, le paiement des taxes et des charges de copropriété. Une situation qui ne saurait perdurer. Voici quelques actions possibles à mettre en œuvre, de la plus conciliante à la plus offensive.
Trouver une solution amiable.
Inutile de vous précipiter chez l’avocat ou l’huissier dès le premier jour de retard de loyer. Mais ne perdez pas trop de temps pour réagir ! Au bout d’une semaine à dix jours, n’hésitez pas contacter (par courrier ou par téléphone) votre locataire (à moins qu’il ne l’ait déjà fait) pour connaître la raison de ce retard et, surtout, à quelle date il compte payer sa dette.
Si ce premier rappel reste sans réponse, envoyez une lettre recommandée avec accusé de réception afin de tenter une seconde tentative de démarche amiable. Si l’impayé est dû à un retard exceptionnel, à une négligence rapidement régularisée, alors l’incident est clos. Échaudé, vous devrez cependant vous montrer vigilant pour les prochains règlements.
Si en revanche les impayés s’accumulent deux mois de suite, le tout sans explications, il faut réagir et discuter avec le locataire pour tenter de trouver un arrangement. S’il rencontre des soucis financiers, un rééchelonnement du paiement des loyers en retard constitue une solution possible, mais rien ne vous y oblige.
A savoir : tout accord concernant un échéancier doit être écrit et signé par les deux parties. Si en revanche, votre locataire est de mauvaise foi, fuyant ou menteur, il faut agir vite et passer à une action plus radicale.
Le recours aux allocations logement et au FSL.
Votre locataire perçoit une aide au logement (aide personnalisée, allocation…) et ne vous a pas payé depuis deux mois ? Vous pouvez demander que ces sommes vous soient versées directement.
Cela permettra de régler une partie sa dette. Pour ce faire, il faut vous tourner vers la caisse d’allocations familiales et accompagner votre demande d’un dossier complet expliquant votre situation (bail, constat des impayés de loyers, identité du locataire) puis, par la suite, démontrer qu’un plan d’apurement a été établi avec le locataire. De son côté, la CAF informe le locataire par lettre recommandée de votre démarche.
Celui-ci dispose d’un mois pour apurer sa dette avant que ne s’enclenche la réorientation des aides. Autre bouée de sauvetage possible : le fonds de solidarité logement (FSL), une aide publique qui peut vous être versée directement.
Solliciter la caution.
Si, à la signature du bail, vous avez demandé à ce qu’une tierce personne se porte caution pour le locataire, c’est le moment de la solliciter pour qu’elle se substitue à ce dernier et prenne le relais du règlement. Dans le cas d’une colocation, la caution de solidarité constitue un réel filet de sécurité car les occupants du logement représentent un groupe indivisible qui doit s’acquitter de la totalité du loyer.
Avec cette clause, chacun devient responsable du paiement des autres. Si l'un ne paie pas, les autres devront assumer sa quote-part. Même si un colocataire quitte la colocation, ce dernier (et souvent avec lui ses parents qui se sont souvent portés caution) reste financièrement responsable des impayés.
A savoir : l’article 55 de la loi Boutin du 27 mars 2009 interdit aux bailleurs (personnes physiques) d’exiger une caution solidaire de leur locataire dès lors qu’ils ont souscrit une assurance loyers impayés. Il existe néanmoins une exception pour les locataires étudiants ou apprentis.
Faire jouer l’assurance.
Vous avez adhéré au dispositif Visale ou souscrit une garantie de loyers impayés (GLI)? Dans ce dernier cas, prévenez tout de suite votre compagnie d’assurance du sinistre. Votre appel ouvrira le dossier et donnera le départ des indemnisations prévues dans le contrat.
C’est généralement au deuxième mois d’impayés consécutifs que se déclenche le processus d’indemnisation. Avant ce délai, les assureurs considèrent qu’il peut s’agir d’un simple incident capable de se résoudre rapidement et à l’amiable. Au bout de deux mois de défaut de paiement, il faut faire sa déclaration à l’assureur.
Les indemnisations interviennent souvent au troisième mois d’impayé et prennent en charge la totalité du loyer dès le premier jour d’impayé. Le règlement s’effectue ensuite tous les trimestres.
Pour mémoire, la GLI peut être souscrite directement auprès d’une compagnie d’assurance ou bien auprès d’un professionnel de l’immobilier, souvent l’administrateur de biens en charge de la gestion locative du logement, pour bénéficier des avantages d’un contrat groupe.
Quant à Visale, une garantie mise en place depuis février 2016, elle concerne les locataires qui ont récemment signé un contrat de travail et couvre tous les impayés pendant une durée de trois années. Ces couvertures s’imposent depuis que le montant du dépôt de garantie a été ramené de deux à un mois de loyer, une somme insuffisante pour couvrir, le cas échéant, les dépenses et les travaux de réparation.
Certains contrats intègrent les frais de recouvrement en cas de contentieux avec le locataire et notamment en cas de procédure judiciaire (frais de justice, d’avocat, d’huissier, d’expulsion, etc.). D’autres proposent en plus une protection juridique. Enfin, certaines clauses prennent en charge la vacance locative.
Il s’agit d’une indemnisation prévue au cas où le logement resterait vide entre deux locataires.
La procédure rapide d’injonction de payer.
Les solutions amiables épuisées, le recours judiciaire devient inéluctable. Facile à mettre en œuvre, cette initiative permet le recouvrement rapide de votre créance.
Pour engager une procédure d’injonction de payer, il faut déposer une requête au greffe du tribunal d’instance du domicile du locataire. Si le juge estime votre requête justifiée, il rend une ordonnance d’injonction de payer.
Vous disposez alors de 6 mois pour la faire signer à votre locataire par l’intermédiaire d’un huissier. Dès qu’il en a connaissance, le locataire dispose d’un mois pour éteindre sa dette ou s’opposer à cette décision. Sans réponse de sa part, vous n’aurez d’autre solution que la saisine du juge pour qu’il applique la clause résolutoire.
Invoquer la clause résolutoire.
Si votre locataire s’entête à ne pas régler ses dettes tout en restant dans les lieux, vous disposez d’une arme lourde : la clause résolutoire. Le manquement au paiement du loyer constitue en effet l’un des motifs de fin de contrat et autorise le bailleur à demander au tribunal l’expulsion du locataire.
En signant un bail qui comporte une clause résolutoire, ou une clause de résiliation de plein droit, le locataire s’est engagé à respecter la fin du contrat en cas de manquement à certaines de ses obligations comme le paiement des loyers et des charges, du dépôt de garantie et celui de l’assurance.
A savoir : même si cette clause figure au bail, vous (propriétaire) ne pouvez faire justice vous-même.
Vous devez faire appel à un juge. Si après vérification des faits il s’avère que le locataire est effectivement fautif, le juge n’a d’autre choix que de prononcer la résiliation du bail. Dans la pratique, les choses sont un peu moins simples car le juge peut décider d’accorder un délai de paiement au locataire.
Demander l’expulsion.
Pour expulser votre locataire, vous devez détenir un titre exécutoire et demander à un huissier d’adresser à l’occupant un commandement de quitter les lieux.
Ce texte doit reproduire les cinq premiers alinéas de l’article 613 du code de l’habitat et de la construction (CCH) qui précisent la possibilité pour le locataire de faire appel, dans les deux mois, au juge de l’exécution. Le préfet le reçoit également et le transmet à ses services afin qu’ils recherchent une éventuelle solution de relogement.
A savoir : le droit à la propriété du bailleur se heurte au Droit au logement reconnu pour tous et désormais inscrit dans la loi du 5 mars 2007 dite Dalo, garantissant théoriquement un droit opposable. La règle devrait être : pas d’expulsion sans relogement. C’est pourquoi le juge de l’exécution, saisi par le locataire menacé d’expulsion, accorde souvent un répit qui peut aller jusqu’à trois ans.
Pendant ce temps, le propriétaire ne perçoit pas de loyers, ne peut relouer son bien occupé, et est condamné à attendre…
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