Locataire : comment contester une augmentation de loyer ?
A la signature du bail, cette somme est fixée d’un commun accord entre le propriétaire et le locataire. Mais c’est souvent en fin de bail que les choses peuvent se gâter. Le bailleur peut décider de majorer cette somme sous prétexte qu’elle est sous évaluée par rapport au marché.
Quelle est la marge de manœuvre du locataire ? Peut-il s’opposer à cette volonté ou doit il accepter cette décision pour rester dans son logement? Explications.
Quels sont les loyers potentiellement révisables ?
Certains loyers ne sont pas révisables notamment si le logement loué permet au propriétaire de défiscaliser (amortissement Scellier, Borloo, Robien) ou si le bailleur a reçu une aide publique pour réaliser des travaux, comme par exemple une subvention de l’Agence nationale pour l’amélioration de l’habitat (ANAH). Dans ce cas, des loyers plafonds sont fixés annuellement par le ministère du Logement et revalorisés chaque année.
En revanche pour les autres logements locatifs sur le marché privé sans engagement particulier du propriétaire, les modalités de fixation du loyer sont libres, si une clause dans le bail le prévoit.
A quel moment est révisé le loyer ?
Les locataires s’attendent généralement à une petite hausse annuelle correspondant à la revalorisation de leur loyer. En revanche, ils font la grimace lorsque le propriétaire modifie les conditions du bail, en l’augmentant carrément.
La loi a heureusement prévu qu’il ne puisse pas le faire n’importe quand. Le bail dure trois ou six ans. À son échéance, si personne ne bouge, il est reconduit dans les mêmes conditions.
Le bailleur peut augmenter son loyer, s’il justifie avoir amélioré le confort de son logement en y effectuant des travaux. Dans ce cas, ces chantiers doivent être prévus, ainsi que la majoration du loyer qui en découlera.
Pour augmenter le loyer, le bailleur doit prouver qu’il est "manifestement sous-évalué", par rapport à des logements comparables, loués dans le même quartier. Pour ce faire, le propriétaire doit respecter les formalités strictes décrites dans l’article 17c de la loi du 6 juillet 1989. Il doit vous démontrer que la valeur locative est inférieure à celles en vigueur pour des logements de sa catégorie.
La loi indique que le propriétaire qui s’engage dans cette voie devra vous fournir au moins six références à Paris, Lyon et Marseille (trois dans les agglomérations de moins d’un million d’habitants), de logements dont le locataire n’a pas changé depuis au moins trois ans.
Attention : Ces références doivent être choisies parmi des logements et des immeubles similaires, situés dans la même zone géographique. Le propriétaire doit indiquer, pour chacune d’elles, l’adresse (le numéro de dizaine de la rue, par exemple 13 pour 135, rue X, l’étage), préciser la présence éventuelle d’un ascenseur, la surface habitable et le nombre de pièces ou d’annexes, comme un garage ou un jardin, l’état d’équipement du logement, le nombre de salles de bains, le type de chauffage, la date de construction de l’immeuble, la preuve que le locataire est le même depuis trois ans, le montant du loyer hors charges.
Pas facile de se procurer ces adresses, ni tous ces renseignements. Ni pour le propriétaire qui les recherche à titre de preuves, ni pour vous (le locataire) qui tentera sûrement de les vérifier.
A savoir : tout locataire peut s’adresser aux observatoires des loyers qui existent dans plusieurs régions, aux associations départementales d’information sur le logement, à des associations de locataires.
Dans quel délai dois-je être averti d’une majoration révision du loyer ?
Six mois avant l’expiration du bail, le propriétaire doit vous proposer un nouveau loyer fixé au regard de ces références. Attention au calendrier, la lettre recommandée avec accusé de réception doit vous parvenir avant le premier jour du sixième mois précédant le terme du bail.
Par exemple si le bail se termine le 30 juin 2011, la lettre doit être remise avant le 1er décembre 2010 (la date apposée par la poste lors de la remise en mains propres de la lettre faisant foi).
La lettre doit également reproduire dans son intégralité les neuf alinéas de l’article 17c de la loi du 6 juillet 1989 détaillant le mécanisme de cette hausse de loyer.
De même, le propriétaire doit joindre les références sur lesquelles il se fonde pour juger de la sous-évaluation manifeste de son loyer.
Quelle parade adopter face à cette hausse annoncée ?
A la réception de la lettre de votre propriétaire, vérifiez dans un premier temps si tout est en règle : la date du bail, les six mois réglementaires… Vous pouvez bien sûr accepter le nouveau loyer proposé. Dans ce cas, il faut envoyer votre réponse quatre mois avant la fin du bail (par lettre recommandée avec accusé de réception). En revanche, ne rien répondre revient à signifier votre refus.
Si vous contestez cette majoration, vous pouvez commencer par discuter avec lui et trouver un accord à l’amiable. En cas de mésentente, vous pouvez saisir la commission de conciliation.
Pour mémoire, cet organe qui siège dans chaque département est composé de deux représentants de bailleurs et de deux représentants d’associations de locataires. Il est compétent pour statuer gratuitement sur deux types de litiges : un désaccord sur une augmentation de loyer souhaitée par un propriétaire et refusée par un locataire, ou un désaccord sur le loyer exigé lors d’une sortie de bail loi 1948.
La commission tente de vous mettre au diapason. Reste que son avis n’a rien d’obligatoire. Autrement dit, il ne s’applique pas si l’une des deux parties n’est pas d’accord.
Pour saisir cette commission, vous devez agir dans un délai de quatre mois avant la fin du bail. Elle vous convoquera vous et le propriétaire pour entendre vos arguments et statuer dans les deux mois qui suivent sa saisine.
Et si la commission de conciliation mène à une impasse ?
Si un accord n’a pas été trouvé devant la commission, l’ultime étape reste le tribunal. L’horloge tourne toujours et le juge d’instance doit être saisi avant la fin du bail.
Attention : Si l’affaire n’est pas enregistrée à temps au greffe, le bail est reconduit dans les conditions antérieures pour trois ou six ans et tout le monde aura perdu son temps.
Le juge peut suivre l’avis de la commission, mais peut décider de se forger sa propre opinion. Sa mission consiste à vérifier la sous-évaluation manifeste du loyer, le caractère habituel et comparable des références et l’adéquation du loyer demandé à ces références.
A savoir : Le locataire peut se présenter seul au tribunal et défendre son dossier. Des contre-références, des photos de l’état de l’appartement, des précisions sur la surface louée sont alors des documents précieux.
Comment est calculée la hausse du loyer ?
Si elle est finalement accordée, la hausse du loyer peut être appliquée en une seule fois ou étalée par tiers sur chaque année si le bail est de trois ans, par sixième s’il a été signé pour six ans. Si le nouveau loyer dépasse l’ancien de plus de 10 %, le lissage se fera obligatoirement sur six ans. Le propriétaire n’arrivera donc à obtenir son nouveau loyer qu’au bout de six nouvelles années de location.
Attention : Cette hausse s’ajoute à l’indexation annuelle et ne la remplace pas.
Exemple : si un locataire payait 300 euros par mois et que le loyer de référence retenu par le propriétaire est de 350, l’augmentation ne pourra dépasser 25 euros par mois (la différence de 50 euros divisée par deux). Le nouveau loyer sera fixé au maximum à 325 euros par mois.
Comme l’augmentation dépasse 10 % de l’ancien loyer, elle est étalée sur six ans : la première année, les mensualités seront de 300 + 25/6 = 304,16 euros. Pendant le reste de la durée du bail, le loyer augmentera de 4,16 euros par an, auxquels il faudra ajouter le coût de l’indexation.
La majoration du loyer peut aussi être calculée en fonction du coût de travaux réalisés par le bailleur. Ces transformations doivent dater d’après le début du bail ou sa dernière reconduction. Ils doivent porter sur les parties communes (l’immeuble) ou les parties privatives (l’intérieur du logement).
Leur montant toutes taxes comprises doit dépasser une année de loyer. Si toutes ces conditions sont remplies, le loyer peut augmenter de 15 % du montant des dépenses.