Acheter à plusieurs
Rien n’empêche d’acquérir une maison de vacances à plusieurs, soit entre copains, soit en famille. Toutefois avant de plonger, chacun doit être conscient de l’engagement patrimonial et financier de l’opération et envisager le scénario en cas de mésentente. A ce jour, trois statuts juridiques permettent d’acheter à deux (ou à plusieurs). Avant de signer l’acte authentique, il convient d’étudier chacune de ces solutions.
L’indivision : simple et fréquente
Le plus souvent, lorsque deux personnes (ou plus) achètent ensemble un bien immobilier, elles sont de fait en indivision. L’acte d’acquisition rédigé par le notaire précise la répartition du bien entre les parties. La propriété à deux peut par exemple être détenue à parts égales (à 50% - 50%) ou inégales (70% - 30% ; 60% - 40 %).
Pour prévenir les conflits, cette répartition doit correspondre à la participation financière de chacun tant du point de vue de l’apport personnel que de l’implication dans le remboursement du crédit immobilier.
Pour certains juristes, la seule incertitude du montage tient au temps que durera la bonne entente des membres de l'indivision. Si les choses se gâtent (les maris se fâchent ou le couple se sépare), deux scénarios sont possibles : si l’un des deux veut conserver le logement commun, il devra acheter à l’autre sa "quote-part" de l’indivision. En revanche, si celui qui reste manque de moyens financiers pour passer à l’acte ou si le "partant" ne veut pas lui vendre et souhaite récupérer ses billes, le logement devra être vendu.
La signature d’une "convention d’indivision" constitue une parade à cette instabilité du dispositif. Elle permet d’éviter pendant une durée déterminée la remise en cause de l’indivision. Grâce à cet acte, concubins ou pacsés s’engagent mutuellement à ne pas mettre fin à l’indivision pendant une durée convenue ensemble. Cette durée maximale est de 5 ans, renouvelable par la suite.
Insérer dans l’acte authentique une clause de "rachat prioritaire" laisse une porte de sortie en cas de décès de l’une des parties prenantes à l’indivision. L’autre pourra racheter les parts du défunt à ses héritiers. Cette disposition évitera par exemple à un concubin de se retrouver en indivision avec la famille de son conjoint disparu.
La tontine : un montage limité et risqué.
Plus rare, la tontine est une clause insérée dans le contrat d’acquisition qui stipule qu’au décès d’un concubin, c’est l’autre qui est considéré comme le seul propriétaire du bien et cela depuis l’origine. Le bien immobilier n’est donc pas dévolu aux héritiers du défunt. Reste que l’acquisition en tontine comporte des inconvénients majeurs limitant son intérêt :
D’abord, le logement doit être habité à titre de résidence principale et sa valeur le jour du décès, ne doit pas excéder 76.000 € (article 754-A du code général des impôts). Compte tenu des valeurs actuelles de marché, cette somme s’avère dérisoire. Si la valeur est supérieure à 76.000 € le jour du décès d’un des deux, le survivant devra s’acquitter des 60 % des droits de mutations calculés sur la valeur du bien.
Ensuite, cette solution juridique présente des risques s’il existe une nette différence d’âge entre les deux membres du couple. En effet, le plus jeune a en principe de plus grandes chances de survivre à l’autre, donc de devenir propriétaire du bien. Ce qui peut conduire le fisc ou les héritiers du plus âgé à considérer la tontine comme une donation déguisée de sa part en faveur du plus jeune. Sauf, si lors de l’achat, l’apport financier du plus jeune a été nettement plus important, ce qui rééquilibre les chances de gain dans l’opération.
Enfin, précisons que le couple est condamné à s’entendre. Les portes de sortie de ce dispositif sont rares : on est condamné à s’entendre même en cas de séparation.
La Société Civile immobilière (SCI): efficace et complexe
C’est la solution la plus élaborée. Ce mode d’acquisition (article 1845 et suivant du code civil) permet à des concubins ou à d’autres personnes sans lien de parenté d’organiser la gestion commune d’un (ou plusieurs) bien(s) immobilier(s) et d’en faciliter plus tard sa (leur) transmission.
La Société Civile Immobilière (SCI) doit de préférence être créée avant l’achat du bien afin de disposer de suffisamment de temps pour rédiger les statuts, nommer un gérant, procéder à l’immatriculation de la société au registre du commerce et publier l’acte dans un journal d’annonces légales.
Mieux vaut élaborer les statuts de cette société par un acte authentique réalisé chez un notaire. Cette précaution est utile afin d’éviter les contestations ou les remises en cause juridiques et/ou fiscales ainsi que le prévoit l’article 1832-1 du Code civil. La création d’une SCI coûte en moyenne aux "associés" (détenteurs de parts de la SCI) entre 600 et 1.500 €. Attention, l’achat en SCI limite les possibilités d’emprunt. Pour mémoire, il est impossible de bénéficier d’un Prêt Epargne Logement.
Une fois la société créée, l’immeuble peut soit être apporté à la nouvelle structure, soit être acquis par la suite. Concrètement, c’est la société, personne morale, qui achète le bien grâce à l’argent apporté par les associés, plus celui émanant d’un éventuel emprunt. La SCI devient de fait l’unique propriétaire du logement. Quant aux associés, ils se partagent les parts sociales de la société à hauteur de leurs apports financiers respectifs.
En cas de départ d’un associé de la SCI, la cession des parts peut s’effectuer auprès du ou des associé(s) qui souhaite(nt) conserver le logement. C’est par exemple une bonne solution pour conserver des biens immobiliers dans le giron d’une famille. En revanche, si les associés ne veulent pas ou ne peuvent pas acheter les parts proposées, il sera par contre impossible de trouver un autre acquéreur, sauf à faire entrer un nouvel associé. C’est un blocage possible de cette situation. En cas de décès de l’un des associés, la SCI n’est pas remise en cause. Les parts du défunt reviennent à ses héritiers. Le bien reste là encore dans la "famille" ou "entre amis".
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