Peut-on librement user de son patronyme pour son commerce ?
Un jargon juridique.
Au moment de créer votre commerce se pose la question de sa structure juridique : SARL, entreprise individuelle, etc., que vous êtes parfaitement libre de choisir, chacune recelant ses avantages et ses inconvénients. En revanche, pour ce qui est de sa dénomination, les choses se corsent et vous devrez prendre en compte quelques notions légales basiques qui encadrent l’appellation d’une société quelle qu’elle soit. Mais avant d’en cerner les contours, éclaircissons quelques vocables propres au jargon du droit.
Dénomination sociale et nom commercial.
La dénomination sociale désigne la personne morale (la société elle-même) telle qu’elle est inscrite au registre du commerce et des sociétés (RCS). Celle-ci doit donc figurer sur tous les documents de l’entreprise, suivie de la forme juridique choisie (SAS, SARL, EURL, etc.) et, le cas échéant, du capital social. Par exemple : MaSociété SARL au capital de 10 000 €. Cette appellation n’est pas forcément perçue par le grand public qui ne distingue le plus souvent que le nom commercial de l'établissement. Ainsi, si tout le monde connaît les hôtels Sofitel, peu de gens savent que la dénomination sociale de la société propriétaire est Accor SA, Société Anonyme au capital de X euros. Cela dit, rien ne vous interdit d’utiliser votre dénomination sociale comme nom commercial, ce qui, dans la pratique, est généralement le cas des PME.
Enseigne et marque.
Cependant, et pour des raisons purement marketing, les fonds de commerce préfèrent la plupart du temps mettre en avant un nom d’enseigne. C’est celui qui apparaît en devanture du magasin et qui peut être différent de la dénomination sociale ou du nom commercial (ou identique, bien sûr). Enfin, et pour terminer ce tour de piste des termes juridiques, sachez qu’est considérée comme marque toute appellation déposée à l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) qui sera dès lors protégée contre toute utilisation future par un tiers.
Utiliser son patronyme.
Reste à l'entrepreneur à choisir la désignation adéquate pour la société qui exploitera son fonds de commerce (et peu importe que soient utilisés le nom commercial, la dénomination sociale, la marque ou l’enseigne, d’autant plus qu’ils peuvent être similaires). Et la tentation est grande d’employer son nom patronymique (le « nom de famille ») pour identifier son magasin. Seulement voilà, si la loi reconnaît la valeur inaliénable du patronyme, elle permet également à monsieur X ou Y de déposer à l’INPI son nom qui devient, de fait, une marque déposée. Ce qui peut engendrer un certain nombre de difficultés à un homonyme qui souhaiterait, lui aussi, user de son nom.
De vrais risques judiciaires.
En effet, un patronyme enregistré à l’INPI est considéré comme une marque que son propriétaire peut interdire à quiconque de déposer à son tour. En revanche, il ne saurait empêcher un autre commerçant d’user de son nom de famille de bonne foi comme le précise l’article 713 du Code de la propriété intellectuelle (CPI). Nonobstant cela, la probabilité d’un recours aux tribunaux demeure importante et il peut apparaître sage d’éviter ce genre de situation à la création de son entreprise. Surtout que les instances judiciaires jugeront de l’antériorité de l’emploi de l’appellation ainsi que des risques de confusion que cette homonymie pourrait provoquer dans l’esprit des consommateurs. Aussi, quand vous aurez opté pour le nom de votre enseigne/marque, ou en cas de doute, n’hésitez pas à vous faire conseiller par un avocat spécialisé en droit de la propriété intellectuelle.